mercredi 31 octobre 2012

Amère défaite!





Vous le savez peut-être déjà, nous avons perdu.


Le 2 route des Romains a été expulsé. Nous sommes dehors.

Un récit parmi d'autres peut-être:

Mardi 30 octobre.
Nous sommes prêts à l'assaut, debout à 5h comme la veille.
Le petit déjeuner parvient quand même à être joyeux.
On observe les mouvements dans la rue, les badauds circulent anodinement et nous font de petits signes d'intelligence de temps en temps. C'est drôle. Il leur manque le journal devant la gueule avec de petits trous. Leur mission est de repérer les éventuels signes confirmant la venue des pandores, pour lancer les appels à soutien le plus tôt possible.

7 heures. Ca y est. Un homme, sur le trottoir d'en face. Il vient de sortir de sa voiture et attend au passage piéton. Un costard, plutôt cher. Une tête d'ancien militaire. Il traverse, passe devant la maison, puis repasse et se plante devant la porte. Les messages sont envoyés illico. Certains hélas n'arriveront que deux heures plus tard.

Un groupe, qui fumait des clopes au fond de l'impasse se dirige à présent vers la maison, armé de pinces monseigneur et de pieds de biche. Cet inquiétante bande organisée sonne à la porte. Nous ouvrons une fenêtre. Qu'y a t'il pour votre service. "Vous n'êtes pas surpris?" nous assène celui qui manifestement est le chef militaire de ces joyeux drilles. Non. Mais on ne s'y habituera jamais.

Les premiers soutien arrivent, tournent autour des agresseurs, sifflent, houspillent, prennent des photos (ce qui n'est pas du goût des expulseurs). Ils ne sont pas beaucoup, les plus tôtifs, mais ils envoient! Pour l'instant, les suppôts de la Ville tournent autour du pot. Ils ne savent pas bien par où ils vont entrer par effraction. Par le jardin? Non, il y a de l'herbe par terre, c'est sale. Par la porte latérale sur ses grosses glissières métalliques. Bof. Par la porte avant, vieux portail de bois rappelant l'époque où toutes ces baraques étaient de petites fermettes? Oui, pourquoi pas? Les outils sont dégainés.

Le groupe de soutien, qui s'est un peu étoffé, se précipite devant la porte, rempart d'amitiés diverses et accumulées contre les sbires. Ces derniers, malgré leur brutalité, veulent garder le contrôle de la situation et appellent du renfort, bleu de préférence. Un petit temps après, trois camionnettes de casqués, armés et harnachés débarquent, se précipitent sur les amis entassés et enlacés devant la porte et les jettent un par un dans le chemin, avant de les enserrer derrière un cordon bleu étanche.

C'est le moment de tester l'efficacité de nos barricades. 1830 et 1848 sont loin, les Socialistes ont bien changé depuis, et nos savoirs-faire ont un peu décliné. Mais chaque minute passée par la dream-team de la C.U.S. à s'acharner en pestant sur nos petits bricolages nous remplit d'allégresse. Qu'ils en chient: c'est normal, puisque c'est une besogne de merde. La porte résiste un temps à leurs assauts, ils se démontent l'épaule en essayant de foncer dedans, puis après avoir eu l'idée de se servir du pied de biche, une planche finit par sauter. A leur grand dam, elle découvre un petit bout du lit de ciment disposé et bordé au pied du portail. Quelle déconvenue! Ils optent alors pour la fenêtre, arrachent un volet, puis deux. Il y a des barreaux. Pince monseigneur, groupe électrogène, disqueuse gros format... Débauche de matériel, c'est facile, pour eux, d'ouvrir des squats.

Tout a cédé, je ne sais pas combien de temps on leur a fait perdre. Pas beaucoup. Pas assez. Mais évidemment, ce ne sera jamais assez. La partie est perdue: un flic rentre par la fenêtre, flash-ball à la main (vous savez, ces armes non-létales qui ne font que casser les rotules et crever les yeux...). Nous optons pour la fuite, plutôt que de nous faire traîner lamentablement par des flics heureux de nous dominer, plutôt que de prendre le risque que l'un ou l'une d'entre nous se fasse isoler du groupe et coincer par un affreux. Par une porte dérobée, nous réussissons à rejoindre le groupe de soutien toujours bloqué par le cordon bleu. Nous refermons la lourde porte latérale sur ses glissières et nous quittons cette maison qui nous a accueilli pendant presque six ans.

Des journalistes étaient là, qui voulaient faire un "papier" sur ce qui s'était passé ce matin. L'un d'eux me fond dessus, caméra et micro en avant, avide d'une déclaration. A qui veut-il que je parle? Que pourrais-je dire à une caméra et à un micro, inertes, qui me mettent en lien avec des spectateurs passifs qui distraitement vont zapper pendant quelques secondes d'un sujet à un autre? Pourquoi ne me parle t'il pas d'abord, lui, simplement, sans tout son attirail? Pourquoi ne me demande t'il pas d'abord quels sont nos moyens de communications, et si éventuellement nous pouvions avoir besoin du sien? Est-il touché par la situation, ou est-ce un simple sujet d'actu pour lui? Est-il possible de filmer la détresse ou la colère sans un minimum d'empathie? Pourquoi ces questions sont-elles totalement absentes de leur démarche, au point qu'ils nous regardent toujours comme des martiens quand nous leur posons? J'ai regardé son reportage plus tard, il traduit cela par une sorte de "les squatteurs refusent de communiquer". Si c'est cela, la communication, oui, je la refuse.

Nous aurions pu alors partir immédiatement en manif dans le quartier, comme un au-revoir, comme une dénonciation de ce qui venait de se passer, et dont les responsables n'étaient pas là. Scander les noms des BIES, des EL KOUBY et autre BOUDJEMA pour que la honte soit plus honteuse encore. Mais il était pour nous extrêmement difficile de nous arracher à la contemplation de ce qui était en train de se passer. Comme une envie morbide de céder à la fascination devant les mureurs, les tueurs d'espace, les urbanistes et leurs petites mains. Nous n'avons rien pu proposer d'autres. Puis, comme certains signes perçus à gauche à droite semblaient indiquer que les flics auraient bien effectué un petit prélèvement de manifestants soigneusement sélectionnés, nous avons choisi de nous replier, d'aller hors de leur présence pour nous retrouver avec ceux qui nous avaient soutenu, et parler, parler de ce que nous avions ressenti, de ce que nous avions pu faire ou pas, et de ce que nous allions faire plus tard.


Merci à tous ceux qui ont décidé de passer avec nous ces derniers moments, tous ceux qui nous ont aidé à leur manière et en leur nom, tous ceux qui nous ont rendus plus forts.
Merci aussi à tous ceux qui ont proposé de nous héberger, le temps de pouvoir se retourner et envisager autre chose.


Mais la lutte continue. A présent, nous allons lancer une enquête publique pour déterminer précisément les responsables de ce gâchis, et les livrer en pâture. Restez curieux.

A bientôt.



  

lundi 29 octobre 2012

Quelle histoire !



L'iconographie de la boxe qui nous a servi à décrire les différentes passes entre nous et la Ville ces dernières années seraient à nouveau d'actualité ces temps-ci.

Les évènements d'aujourd'hui en sont restés à des démonstrations de jeu de jambes. Un pas à gauche, deux pas à droite, un pas en avant, deux pas en arrière.

Ce matin, à 8h30, la camionnette d'une entreprise s'est garée devant la maison, avec pour mission de la murer.
Crochet du gauche.

Nous avons préféré ne pas mettre en branle la chaîne téléphonique, habitués aux couacs de la part de notre adversaire : peut-être s'agissait-il d'une étape que nous pouvions dépasser par nous-mêmes.
Garde bien fermée.

Les commanditaires de cette opération ont dû avoir un moment de distraction, puisque les employés envoyés ont dû poireauter deux heures devant chez nous dans le froid, avant de repartir. Ces employés disent qu'ils ont consigne de revenir demain.
Sauvés par le gong ?
Mais cela ne nous garanti absolument pas que l'expulsion ne peut pas avoir lieu cette après-midi.

Que se passe-t-il dans les couloirs de la Mairie?
Y'a-t-il un pilote dans l'avion ?
Qui est le vrai arbitre du match ?

Encore une fois, nos exigences sont claires :

  • nous passerons l'hiver ici, on crèvera de froid une autre fois.
  • l'association Papier Gâchette ne sera pas expulsée avant son relogement, son matériel ne sera pas mis en danger par un assaut guerrier, ni abandonné dans un hangar vide.
Nous sommes dans les cordes, mais nous n'y sommes pas seuls.
Merci de votre soutien.
On reste en contact.

dimanche 28 octobre 2012

Ne criez pas au Loup!

Ne Venez pas si vous n'avez aucune nouvelle demain à 6H, Vous devriez être prévenu par téléphone avant .......MERCI

Taupe départ!

Coucou les aminches!

Lisez ce message jusqu'au bout avant de cliquer n'importe où et de courir dans tous les sens dans votre salon. Sinon Gilgamesh ne sera encore pas content (Cf. courrier des lecteurs du 25 octobre).

Nous n'avons pas pu beaucoup avancer ce week-end. Les élus se reposent.

Mais nous avons reçu mystérieusement un impérieux avertissement:

Ça pourrait éventuellement être pour demain matin lundi, à six heures.

Alors que faire?

Evidemment, cette info est sujette à caution, anonyme, taupesque, à la limite du corbeau.

Mais pourquoi serait-elle fausse?

Alors voilà ce que nous vous proposons:
On ne lance pas d'appel fixe pour l'instant. On va se contenter de rester encore plus sur le qui-vive. Prêts à lancer l'info, pour que toutes celles et tous ceux qui le veulent puisse voler à notre secours, si elles ou ils ont pensé à laisser leurs téléphones allumés cette nuit.

Un genre de starting-block virtuel, quoi.

Si c'est pas demain, ça laisserait la possibilité de choper in extremis les élus qu'ont peut, et peut-être la possibilité pour le Préfet d'avancer la trêve hivernale de trois jours, etc.

Si c'est demain, et qu'on ne réussit pas à les repousser, on va d'abord s'occuper de nos affaires, et ensuite on s'occupera de faire la pub des responsables de ce gâchis.

Alors à bientôt!

(Quel suspense...)


vendredi 26 octobre 2012

flash du vendredi soir, bonsoir!





Bonjour à toutes et tous!

Voici les news, flash spécial!

Jusqu'ici tout va bien au 2 route des Romains, la matinée a brillé par l'absence d'escouades de forces de l'ordre jusqu'à 11h30, puis un petit nuage de policiers en tenue a obscurci le ciel, inspectant le bâtiment pour transmettre un rapport circonstancié à une obscure éminence grise à l'autre bout du talkie-walkie de fonction. Leur besogne faite, ils se sont éclipsés.

Nous avons dans l'après-midi grossi les rangs d'une manifestation de protestation contre l'expulsion de la ZAD (Zone à Détruire) de Notre-Dame-des-Landes, où une foule bigarrée lutte depuis de nombreuses années contre l'implantation au forceps d'un aéroport rasant tout sur son passage. Cette offensive Attilesque est menée par le Socialiste Jean-Marc Ayrault, propulsé depuis Premier Ministre pour bons et loyaux services. Le rapprochement nous semblait couler de source, et quelle ne fut pas notre surprise de croiser là-bas l'écologiste en charge du dossier de l'aménagement urbanistique de l'entrée de Koenigshoffen, Monsieur Jund. Celui-ci nous assura alors de son plus indéfectible soutien. Est-ce une manière de ménager et la chèvre et le chou? Nous le verrons sur pièces.

 Puis à vingt-heures avait lieu au Temple Neuf une soirée inaugurale célébrant les 170 ans des diaconesses de Strasbourg. Férus de culture, nous y avons été, et nous sommes tombé par hasard sur Monsieur Ries, Maire de Strasbourg. Ce fut l'occasion de lui exposer la mauvaise plaisanterie de laquelle nous étions les dindons. Il ne semblait pas très au courant, et sembla surpris d'apprendre de notre bouche le fait que les choses se précipitent à ce point. Il est clair qu'après de nombreux mois de discussions durant lesquelles une solution "à l'amiable" semblait se profiler, la situation actuelle ne peut que mener à ce que ça se passe mal. Pour tout le monde.

Car il n'est pas acceptable d'être expulsé manu-militari à la veille de l'Hiver alors que les travaux de fouilles archéologiques promettent de retarder les travaux de telle sorte que nul n'est à trois mois près, surtout pas les dépouilles des centurions Romains dormant sous notre maison.

Il n'est également pas acceptable que l'atelier Papier Gâchette soit tout entier abandonné dans un local muré, à la merci des bonnes volonté d'un quelconque huissier, en attendant un éventuel relogement sans la moindre garantie.

Ils nous attaquent, on se défend.

Voilà, c'est la fin de notre flash spécial, à vous les studios!

 

jeudi 25 octobre 2012

Flash spécial du jeudi 25 octobre

Chat lu les poteaux !

Nouveau flash spécial dans la série « nouvelles quotidiennes du 2, route des Romains ».

Du côté des fâcheux, nous nous sommes invités à une réunion publique concernant le logement des résidents étrangers au sein de laquelle trônait Philippe BIES, responsable entre autres de la politique logement de la C.U.S. Notre but n'était pas de perturber cette réunion, mais de mettre cet élu face à sa responsabilité dans notre éviction pré-hivernale. Il s'est alors contenté d'agiter silencieusement la tête dans diverses directions plutôt que de faire montre de ses inénarrables talents d'orateur.

Nous avons par ailleurs aperçu Magyd Boudjema, zélé fonctionnaire affecté à la mairie de quartier de Koenigshoffen, en train de photographier nos véhicules personnels ainsi que notre façade, prenant acte de notre banderole. Il pourra fièrement exhiber plus tard à ses enfants le tableau de chasse de ses victimes, attendu qu'il semble s'être acquitté avec plaisir de la sinistre besogne de déloger quelques uns de nos voisins avant nous.

Revenons un instant à la banderole : Ce slogan « ça vous coûtera cher de nous foutre en l'air » est une référence au titre d'un documentaire audio évoquant la lutte conjuguée d'opposants au nucléaire et d'ouvriers sidérurgistes enragés par la fermeture de leur boîte. Cette lutte, d'une ampleur autre que la nôtre, nous a parlé par son refus du fatalisme résigné devant les décisions de possédants se présentant comme inéluctables. De la même manière, leur plan de rénovation de la Ville n'est pas anodin, et correspond à une vision du vivre ensemble tout à fait particulière.

Pour finir, sachez que nous n'avons aucune connexion internet à la maison, c'est pourquoi nous ne pouvons pas donner de nouvelles plus d'une fois par jour sur ce blog. C'est déjà pas mal. Voilà pourquoi nous préférons recueillir les numéros de téléphone des personnes souhaitant être averties au moment de l'expulsion, afin de former des chaînes téléphoniques pour faire circuler les S.M.S. d'urgence le plus rapidement possible. Ecrivez-nous à zik@no-log.

A bientôt donc.


mercredi 24 octobre 2012

Alerte Expulsion


Alerte expulsion ...




Nous habitons le 2, route des Romains depuis presque 6 ans.

L'huissier est passé ce mercredi 24 octobre pour nous mettre en demeure de quitter les lieux pour... le lendemain.
On nous demande de mettre six années de vie en carton en une nuit.

Il leur faut se dépêcher pour ne pas atteindre la date du 1er novembre, début de la trêve hivernale. Si nous sommes expulsés avant la date limite, nous aurons certainement moins froid cet hiver.

Quant à l'atelier Papier Gâchette, après les nombreux rebondissements survenus depuis ce printemps dans le processus de relogement, l'expulsion du site laisse douter de la concrétisation rigoureuse des engagements de la Mairie. Depuis une semaine, l'association était censée avoir les clés d'un atelier qui a été spécialement aménagé (pour la modique somme de 120000 euros). Mais après moult imbroglios internes à la Cus, celle-ci n'est plus en mesure de laisser ce lieu à Papier Gâchette et lui demande de déménager au plus vite dans un autre site, présentement en état de friche. Le déménagement promis sans histoire paraît aujourd'hui douteux même si la C.U.S. se veut rassurante: elle promet malgré les menaces d'expulsion que Papier Gâchette aura toujours accès à son atelier de la route des romains via des rendez-vous avec l'huissier. Combien de temps l'association sera-t-elle entre un local dont elle n'aura plus les clefs, et un autre en travaux ?
Papier Gâchette n'a pas à faire les frais de leur mauvaise gestion.

Alors que faire ?
Nous avons une semaine devant nous, durant laquelle tout est à craindre.
Nous comptons bien faire un maximum de bruit autour de cette histoire, parles-en à ta grand'mère, à ton voisin, si tu veux appeler les élus pour les mettre en face de leur responsabilité, fais donc !

Il faut que l'expulsion ne passe pas inaperçue, et pour ça, s'il y a un max de monde pour observer leur manège, c'est mieux. Alors si tu te sens l'âme d'un agitateur, et que tu es prêt à rameuter tes amis, envoie-nous un mail à zik@no-log.org avec « je suis prêt à avertir tant de personne tôt le matin, voici mon contact ».